« JUJUR SABAR »
les vies projetées de NOVIADI ANGKASAPURA 17.05 — 06.07.2023 1 rue Elzévir, 75003 PARIS
L'EXPOSITION
Dans la continuité de son vestiaire irrigué d'influences plurielles, LEMAIRE s'est inspiré des dessins palimpsestes de NOVIADI ANGKASAPURA pour créer une série de pièces en coton. Une fois portés et mis en mouvement par les corps, ces vêtements aériens et souples donnent vie aux personnages de l'artiste indonésien, faisant écho à la volonté de LEMAIRE d'offrir un espace d'expression à des artistes singuliers.
NOVIADI ANGKASAPURA
Noviadi Angkasapura est né en 1979 à Jayapura, dans la partie indonésienne de l’île de Nouvelle-Guinée, où ses parents, originaires de Java, se sont établis. Dans cette région peu peuplée,Angkasapura passe toute son enfance et son adolescence sur les rivages de l’océan Pacifique dans une végétation luxuriante. Profondément marqué par son environnement, les imaginaires animistes et les influences multiculturelles des populations venues des îles voisines comme Bornéo, Sulawesi, Sumatra, Bali ou Madura, Angkasapura représente ce qui l’entoure : rochers ciselés, rivières tracées ou troncs d'arbres sculptés.
NOVIADI ANGKASAPURA CAPTURÉ CHEZ LUI, À JAKARTA, PAR THOMAS SITO, 2023
« Enfant, j'étais obsédé par le dessin. J'aimais créer des motifs sans fin, des figures imaginaires, des nombres aléatoires, des lignes capricieuses, des répétitions ornées, etc. Mes cahiers étaient remplis à ras bord de compositions touffues où le réel et l'imaginaire dansaient l'un avec l'autre »confiait-il au galeriste Randall Morris. Selon ses propres dires, à la veille de son 24e anniversaire, Angkasapura est visité par un esprit intercesseur. Cette puissance spirituelle le guide, tout en projetant son œuvre dans un flot créatif ininterrompu. L’acte de dessiner représente à la fois une prière répétitive et le moyen de faire passer des messages venant de cet esprit.
Dans cette équation, Angkasapura se considère donc comme le véhicule et n’a pas la prétention de comprendre et d’expliquer le contenu de ses dessins, accomplis au stylo bille, à la mine de plomb ou au crayon de couleur sur des papiers ou des cartons de petit format. Ces dessins, où dansent les silhouettes sauvages de démons, djinns et créatures anthropomorphes, sont inlassablement traversés par les mantras KI RADEN SASTRO INGGIL et JUJUR SABAR, de sinueuses calligraphies insufflant les vertus d’honnêteté et de patience.
Bien que s'inspirant de diverses traditions iconographiques – les marionnettes javanaises du wayang, théâtre d’ombres populaire en Indonésie, ou l'épopée du Râmâyana – les figures d’Angkasapura ne sont jamais littéralement issues de ces sources. Dans une temporalité diffuse et une composition proche du collage, il fusionne l’Orient et l’Occident, les styles et les registres. Entre extase et trouble, paradis et damnation, il reproduit dans un acte méditatif des écheveaux de lignes, sédimente les empreintes - météorologiques, géologiques, anatomiques ou astronomiques. Comme sur un banc de montage ou une réalité augmentée, l’espace intérieur du dessin se dilate, les formes se dédoublent, les tracés vibrent et se confondent : sous nos yeux, en apesanteur, émergent alors des portraits vivants, des visions diffractées ou des îles éclaboussées du ciel.
Noviadi Angkasapura réside aujourd’hui à Jakarta et vit de son activité créatrice. Une activité qui lui permet d’entretenir sa famille et de rêver à un futur musée contenant jusqu’à un million de dessins. Son travail est exposé dans la Collection de l’Art Brut de Lausanne. Angkasapura est représenté à l’étranger par les galeries Henry Boxer en Angleterre et Cavin-Morris à New-York.